Espion(s) et Secret Défense constituent d'intéressantes tentatives d'incursion du cinéma français sur le territoire anglo-saxon du film d'espionnage.
Unis par leur hommage au genre, les deux films, sortis à peu d'intervalle, racontent néanmoins des histoires fort différentes, à travers des styles diamétralement opposés.
Ainsi, Espion(s), premier film de Nicolas Saada, ex-critique des Cahiers du Cinéma, utilise le film d'espionnage comme un prétexte, un moyen pour faire se rencontrer ses personnages et mettre en scène une histoire d'amour assez classique dans le cinéma d'auteur français.
Secret Défense est lui beaucoup plus intéressé par la description du monde du renseignement en tant que tel.
Espion(s) (2009), de Nicolas Saada
Synopsis : Vincent, un jeune homme brillant mais refermé sur lui-même, travaille comme bagagiste dans un aéroport et refuse le parcours tracé que lui offraient ses études. Avec son collègue Gérard, Vincent a l'habitude de voler dans les valises avant leur embarquement en soute. Alors qu'il fouille un bagage diplomatique, Gérard meurt brutalement suite à une explosion. Le propriétaire de la valise, un diplomate syrien, récupère le bagage avant de disparaître.
Vincent est alors coincé par la DST qui lui propose un marché : lui éviter la prison et collaborer avec les services secrets français et anglais pour retrouver les hommes impliqués dans l'explosion.
L'enquête conduit Vincent à Londres, qui, sous une fausse identité, essaie de se rapprocher d'un homme d'affaires anglais, Peter Burton, apparemment manipulé par les services secrets syriens. La DST et le MI5 poussent alors Vincent à séduire l'épouse de Burton, Claire, une française au caractère fragile. Vincent se rapproche de la jeune femme et la manipule pour la forcer à collaborer avec le MI5. Déstabilisé par les enjeux de la mission, Vincent va être bientôt rattrapé par ses sentiments.
Vincent est alors coincé par la DST qui lui propose un marché : lui éviter la prison et collaborer avec les services secrets français et anglais pour retrouver les hommes impliqués dans l'explosion.
L'enquête conduit Vincent à Londres, qui, sous une fausse identité, essaie de se rapprocher d'un homme d'affaires anglais, Peter Burton, apparemment manipulé par les services secrets syriens. La DST et le MI5 poussent alors Vincent à séduire l'épouse de Burton, Claire, une française au caractère fragile. Vincent se rapproche de la jeune femme et la manipule pour la forcer à collaborer avec le MI5. Déstabilisé par les enjeux de la mission, Vincent va être bientôt rattrapé par ses sentiments.
En préparant Espion(s), Nicolas Saada avait observé la sortie de bureau des services secrets britanniques et avait constaté la banalité des physiques et des attitudes de ce qui s'apparentaient à d'ordinaires bureaucrates. Il est vrai que le grande masse des agents de renseignement sont de simples fonctionnaires rompus à l'analyse de données (seule la matière des données est particulière).
Le film d'espionnage est donc un moyen, pas une fin.Nicolas Saada dépouille l’agent secret de ses oripeaux glamours pour dévoiler une humanité, faite de banalité (le choix de Guillaume Canet, au physique de Mr tout le monde) et de sentiments ambivalents (Vincent est tour à tour effrayé, amoureux, manipulé et héroïque).
Le recrutement de Vincent par la DST s’opère dans des bureaux glacials, les yeux dans les yeux avec son officier traitant.
Aux exploits super-héroïques d’un James Bond, le réalisateur préfère filmer (assez bien) la ville et ses quartiers, créer des atmosphères pour mettre en scène la relation amoureuse entre Vincent et Claire, à la fois provoquée et contrariée par l’intrigue d’espionnage.
Malheureusement, en dépit d’une maîtrise évidente du style, de références cinématographiques élégantes (des clins d’œil au Vertigo d’Hitchcock) et de nombreuses scènes réussies (la tentative d’assassinat de Vincent à Paris, la tension du dîner chez les Burton, la poursuite finale dans le métro…), le film ne parvient pas, selon moi, à créer l’émotion recherchée par le réalisateur.
On ne ressent guère entre Claire et Vincent l’intense passion suggérée par le scénario…
Je ne parviens d’ailleurs pas à décider si cela vient du jeu des acteurs (je suis rarement convaincu par les interprétations de Guillaume Canet, qui est plutôt un réalisateur) ou d’un excès de contrôle de la mise en scène.
De plus, on peut regretter le manque de crédibilité du scénario : envoyer un amateur déjouer un projet d’attentat syrien me semble assez peu probable…
C’est quand même plutôt pas mal pour un premier film, on surveillera la suite…
Secret Défense (2008) de Philippe Haïm : un hommage trop respectueux
Sorti un an avant Espion(s), Secret Défense est l’anti-thèse du film de Nicolas Saada.
Le film raconte les destins parallèles de deux agents guerroyant pour des camps opposés.
Diane (Vahina Biogante), jeune étudiante en Langues O, est recrutée par Alex (Gérard Lanvin), maître espion de la DGSE, et est envoyée surveiller Al Barad (Simon Abkarian), soupçonné de préparer un attentat terroriste contre la France.
En effet, la branche hexagonale du réseau salafiste de Al Barad « retourne » en prison un dealer paumé, Pierre (Nicolsa Duvauchelle), pour le transformer en kamikaze fanatique.
Dès les premiers plans, on remarque la filiation avec la série US 24h.
D’abord sur le plan formel, mais aussi dans la description de l’univers du renseignement (ordinateurs vrombissants, QG-bunker, électronique toute puissante…).
Au dépouillement d’Espion(s), Secret Défense préfère multiplier les effets de mises en scène (musique, caméra…).
L’intrigue est assez plaisante (l’idée de la partie d’échecs à distance entre maîtres-espions via des pions novices).
Le lavage de cerveau de Pierre en prison par ses nouveaux « frères » est particulièrement bien décrit.
Contrairement à Nicolas Saada, l’irruption du romanesque dans le bruit et la fureur du film de genre n’est pas le mobile de Philippe Haïm, qui se contente d’une fascinationpour les gimmicks du film d’espionnage.
Au final, Secret Défense est limité par ses ambitions.
L’objectif d’une honorable adaptation (voir imitation) française d’un genre en vogue est atteint, sans que cela apporte quelque chose de nouveau, de spécifiquement français, à ce même genre.
Espion(s), et Secret Défense ne parviennent donc pas à battre les anglo-saxons sur leur terrain, malgré les évidentes qualités de leurs réalisateurs.
Donc, à ce jour et à ma connaissance (n’ayant pas encore vu les autres tentatives comme Une affaire d’Etat ou L’affaire Farewell), seul Les Patriotes d‘Eric Rochant, sous estimé à sa sortie en 1993, est parvenu à combiner la crédibilité et les qualités artistiques d’un grand film d’espionnage « à la française ».
Espion(s), film français de Nicolas Saada avec Guillaume Canet, Géraldine Pailhas, Stephen Rea, Hippolyte Girardot (1h39).
Bande annonce :
Espion (s) - Bande-annonce
envoyé par baryla. - Court métrage, documentaire et bande annonce.
http://www.marsfilms.com/film/espion(s)
Secret défense, film français de Philippe Haïm avec Gérard Lanvin, Simon Abkarian, Vahina Giocante, Nicolas Duvauchelle (1h40).
Bande annonce :
http://www.secretdefense-lefilm.com/
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